samedi 19 novembre 2011

Cross over et contre tous.





Vendredi c'était le cross du collège, et dans ce collège, le cross est une véritable institution. Depuis quinze jours, le parcours est affiché en salle des professeurs et chacun connaît son poste. Moi, je dois veiller à ce que les élèves ne coupent pas par le parking du skate parc. C'est rigolo que l'on me mette à cet endroit. J'ai passé toute ma scolarité à tricher pour toutes les compétitions sportives. D'ailleurs, j'ai toujours beaucoup d'affection pour les bons tricheurs. Je dirais même, que je pourrais laisser tricher un élève à condition qu'il le fasse avec classe et conviction. Je n'aime pas les besogneux à la petite semaine.
Gruger son monde, n'est pas à la portée de tous. Pour certains élèves, et ce sont ceux que j'apprécie le plus, c'est un métier qu'ils choisissent pour faire fructifier un don. Très peu de métiers en définitive se choisissent pour un don.
Certes, il y a des enfants dont on dit qu'ils sont doués en dessin, en sport ou pour faire les clowns.
Mais combien d'entre eux finiront dessinateurs, sportifs de haut niveau, comiques??? Par contre, on ne dit jamais qu'un enfant est doué en maths ou en sciences physiques, mais qu'il est bon ou très bon. Toute la nuance est là: lorsqu'on est bon, on peut devenir professionnel de sa bonté mais lorsqu'on est doué, on le devient rarement. Bref, tricher est l'un des rares dons avec lequel on peut faire profession. J'ai donc et j'y reviens, une affection particulière pour les tricheurs professionnels. Ceux là sont respectables car lis désirent avant tout, faire partager et admirer leur savoir faire. Jamais, un élève tricheur professionnel ne gaspillera des années d'apprentissage pour réaliser un coup sans témoin(s). Au contraire, il laisse toujours planer dans son comportement l'ombre d'un doute, un détail qui s'adresse à notre méfiance: regarde bien, je vais t'embrouiller. Il prépare son "oeuvre" comme une pièce de théâtre: trois coups retentissent, le rideau se lève, l'espace fictionnel s'offre à nous. A la condition que cette trilogie soit respectée, les élèves auront toujours le droit de me tromper.
A l'instant où je termine d'écrire ces quelques lignes, une voix m'interpelle.
- Monsieur Mariotti vous avez vu, j'ai coupé!!!!!!
Je regarde l'élève, presque gêné de ne pas l'avoir surpris.
- Non j'ai pas vu, désolé...
Le petit quatrième fait demi tour, et passe par le bon chemin. Lorsqu'il est à ma hauteur, il lâche.
- Vous avez vu, si "j'aurais" voulu.

8 commentaires:

Blogger Edouard Chevais-Deighton a dit...

J'adore te lire quand tu racontes tes élèves. :)
On y sent toute la tendresse que tu éprouves à leur égard. Et encore une fois, j'aurais aimé avoir un prof comme toi. C'est rare.

20 novembre 2011 à 08:37  
Anonymous Olivier a dit...

Encore merci Ed pour tes beaux commentaires. Félicitations pour ce que tu sais......

20 novembre 2011 à 13:34  
Blogger Association des amis du musée Mélik a dit...

Voilà tu as trouvé le titre de ton livre avec "le génie des élèves"... Ca me rappelle un jour un peit 5° qui me demande : "M'sieur, vous pourriez punir quelqu'un qui n'a rien fait?"
Et moi : "Ben, non, s'il n'a rien fait je ne vois pas pourquoi je le punirais..." Et lui, avec un grand sourire : "Bon, ben j'ai pas fait ma rédaction!"...

20 novembre 2011 à 19:03  
Anonymous Olivier a dit...

Tu as raison, "le génie des élèves", c'est vraiment bon comme titre.J'avais aussi pensé à:" Journal d'un prof qui fût élève". D'ailleurs, j'ai bien envie de le faire ce bouquin. Je te prends ton anecdote pour la quatrième de couv, et je te cite en bas de page. A plus l'ami.....

20 novembre 2011 à 19:30  
Anonymous Chraibi Zineb a dit...

Je trouve que votre point de vue est intéressant.
C'est vrai qu'on peut rester parfois admiratifs devant les ''exploits'' d'un bon tricheur. mais je pense qu'il y a un danger lorsque ce ''don'' tourne à la psychose...
Je me demande aussi si le fait de tricher ne serait pas une forme d'opposition, pour le tricheur, contre les contraintes de la société, une recherche de liberté.

22 novembre 2011 à 00:47  
Anonymous Olivier a dit...

Ton point de vue se tient aussi. Il y a une forme de résistance chez le "bon" tricheur. Dans mon petit texte, je ne parle que des élèves, il faut donc replacer la tricherie dans un contexte "ludique" pour ne pas dire collégial.

22 novembre 2011 à 08:35  
Anonymous JMP a dit...

Je dis souvent à mes élèves que réussir ses études consiste moins à jouer de ses vertus qu'à cacher ses lacunes. Et l'artiste ne fait que tricher avec la réalité avec plus ou moins d'habileté et de malice. Tricher est une preuve d'intelligence à condition que ça ne pénalise personne, pas même ceux qui ne trichent jamais. En même temps ça ne sert à rien de tricher si ça n'embrouille personne. Et moi-même qui écris tout ça je triche en faisant croire que je comprends quelque chose à ce que j'écris.
Allez, bises à Canto
OM aux chiottes!

23 novembre 2011 à 22:25  
Anonymous Olivier a dit...

Si, si, je comprends ce que tu dis!!!
Par contre, tu n'as pas le droit de me dire d'aller aux chiottes. Je te rappelle que mes initiales sont OM.
Bises....

24 novembre 2011 à 08:42  

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