jeudi 29 septembre 2016

Le génie des élèves et de ceux qui le furent: du trait à la ligne.

Parfois, ce qui ne peut être dessiné peut s'écrire.


Collègue à ma droite. Tête de Charles Denner. Poils dans les oreilles. À ce stade de la compétition, c'est une entrave à la bonne audition. Poils dans le nez, comment peut-il respirer ? Poils Baobabs sur les sourcils, sans sourciller est-ce utile ? Chemise aubergine à fines rayures blanches très eighties et blouson noir imitation cuir posé sur le dossier de la chaise. Pantalon gris en flanelle trop court. Alors, je vois les chaussettes de tennis, trois bandes. Bleu, blanc, rouge. Super, un patriote. Discret, mais patriote. Assorties à rien, mais vraiment françaises les chaussettes! Chaussures en matière indéfinissable à l'oeil nu. Hyper compliquées dans la forme. Le designer doit être en prison. Je vous jure, on m'a obligé à dessiner ces merdes! Moi, je voulais pas ! Et puis, faut bien que je nourrisse la famille. J'ai 5 enfants, z'allez pas me mettre en tôle pour une paires de shoes mal dessinées, merde ! Y'a plus grave non? Au sol, appuyé contre un pied de chaise, le cartable ressemble à une mallette de premiers secours. Avec sa lanière qui s'étale sur le carrelage comme une trompe cherche l'eau, il paraît agoniser, comme moi. 

mercredi 28 septembre 2016

Le génie des élèves et de ceux qui le furent: gueules de stage.








Aujourd'hui, j'étais à L"ÉSPÉ (école supérieure du professorat et de l'éducation). L'ÉSPÉ a remplacé l'IUFM ( institut universitaire de formation des maîtres). Quatre lettres, pas plus, pour dire de façon un peu pompeuse que pour les lauréats du Capés ou de l'agrégation l'école n'est pas finie. Aujourd'hui donc, mes amis tuteurs et moi-même étions conviés à une réunion de formation de tuteurs afin que nous puissions à notre tour former des stagiaires qui eux mêmes forment des élèves qui forment des citoyens qui forment des électeurs qui forment un pays qui forment des élites qui forment des réformes qui forment des textes qui forment des pensées qui forment des idées reçues qui forment des ghettos qui forment des clans qui forment la peur qui forme la méfiance qui forme... Alors, j'ai croqué.

samedi 17 septembre 2016

Le génie des élèves et de ceux qui le furent: la rentrée en images peut sortir des yeux.

Mon badge-passe est piqué dans ma barbe. Ce qui fait beaucoup rire les élèves.

La gentille conférencière me passe la main, car elle comprend très vite que je suis le spécialiste mondial du cinéma de série B et Z. Je brille et mes élèves sont trop, trop fiers.


Hier, avec ma classe principale-trop-géniale-gentille-compétente-lumineuse-altruiste-polie-branchée et deux collègues CPE, nous avons fait la rentrée en images aux rencontres photographiques d'Arles.
Pour faire court, j'ai envoyé copieusement balader (j'ai hésité à écrire autre chose, mais je sais que ce blog est beaucoup lu par les élèves)...
- .... une vieille guide toute moche qui accompagnait plein de vieux-tous-moches dans les arènes d'Arles et qui trouvait que 29 petits bien élevés et beaux comme des astres faisaient trop de bruit. Et donc, comme j'étais chaud-bouillant, je lui ai répondu que dans l'antiquité, 20 000 personnes déchainées s'entassaient dans le cirque pour regarder le sang gicler façon Péplum. Et que mes élèves allaient continuer de s'éclater dans leur jeu de piste.  Et que personne, surtout pas des vieux vilains et méchants qui marchent si lentement qu'ils semblent à l'arrêt n'entraveraient les rires de la France de demain. On n'aime pas la jeunesse dans ce pays, ce n'est pas nouveau.
- ... trois gardiens de la grande Halle (aux ateliers mécaniques) parce qu'ils empêchaient mes élèves d'ouvrir les différents catalogues des photographes posés dans la librairie. Là, j'ai gueulé comme un putois, façon marseillaise, à croire qu'il y a que ça qui marche. En quoi ça vous dérange qu'ils ouvrent les livres? Ils savent comment ça marche. Ils lisent. Ils savent qu'ils faut tourner les pages. Ça fait trois mois que le monde entier vient tourner les pages de ces putains de livres. Z'allez pas me dire que vous interdisez aux Japonais ou aux Américains de tourner les pages, non? Et puis, je viens chaque année depuis 15 ans, j'ai jamais vu personne se laver les menottes avant de toucher. Et ne me sortez pas le faux prétexte des images hypothétiquement choquantes, z'ont tous internet illimité à portée de mains, faudra bien qu'un jour ils comprennent ce qu'il y a de bon ou de moins bon pour eux. On va pas mettre un gardien du temple derrière chaque individu! Donc, s'ils veulent regarder, ils regardent!
- ... deux classes de BTS et Terminale. L'après-midi, nous sommes allés à l'école nationale supérieure de la photographie pour un atelier sur... J'sais pas et vous allez comprendre. Nous entrons dans un amphithéâtre trop petit pour le nombre de personnes. Deux jeunes animateurs essaient de faire respecter le silence. Mes élèves prennent place sans un bruit puisqu'ils sont au top. Je reconnais un collègue d'un lycée privé de Marseille avec ses élèves de terminale et BTS. De belles têtes de gars et filles du privé, des tronches de vainqueurs. Rien qui dépasse au niveau dégaine. Du privé à tous les étages. Bref, la conférence commence, et là, c'est le cauchemar. Les bons petits enfants bien mis foutent un bordel monstre, je ne trouve pas d'autres mots. De ma vie de prof, je n'ai jamais vu ou entendu ça. Mes élèves et mes deux collègues sont scotchés. Les deux pauvres animateurs perdent pieds. Malaise. Horreur. Pitié. Dégoût. Haine. Deux solutions, soit je me lève et je fais un carnage, soit je la joue décalé. C'est la bonne option. Je me redresse. Lève le bras comme un gentil. Je demande la parole. Excusez-moi, nous allons partir manger une glace. Merci pour l'accueil et à bientôt. Tous mes élèves se lèvent, sans un mot, dignes et classes. Nous sortons. Je lis le dépit dans le regard des pauvres animateurs. La jeune fille s'approche de moi pour s'excuser. Je la plains. Place du Forum, chez le meilleur ouvrier glacier de France, on se gave de sorbet. Jojo s'approche et me dit. Monsieur, y'a pas deux profs comme vous! Bien sûr qu'il n'y en a pas deux comme moi! Rappelez-moi de déduire de mes impôts ce que je verse aux écoles privées sous contrat.

vendredi 9 septembre 2016

Le génie des élèves et de ceux qui le furent: jouer, toujours...




Ce petit film a été tourné avant les grandes vacances. Il a été monté pendant. Et il est sorti après.  Bref, Jojo et Pablo du collectif The Five Movies sont toujours aux manettes PAK MAN .




vendredi 2 septembre 2016

Le génie des élèves et de ceux qui le furent: l'art d'exaspérer ses collègues.

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Ce matin, à 10h30, j'ai récupéré ma classe principale de quatrième cinq. En général, c'est monsieur le principal ou mesdames les C.P.E qui appellent les élèves au micro. Le professeur principal se tient en retrait, prend un air tout à la fois sévère et détendu et les collégiens forment le rang derrière l'adulte. Et puis, lorsque le dernier nom tombe, le professeur enclenche le pas et les petits canards l'emboîtent en rythme, heureux ou pas, ils se dirigent vers la salle de classe. Moi, j'ai un statut un peu spécial. Je suis une sorte de rock star qui se la pète. Le Pete Doherty des arts plastiques, le Joey Star de l'enseignement, le David Bowie de la pédagogie. Moi, on me tend le micro, je m'assieds sur les marches, je me saisis de la liste et, avant d'énumérer les noms, je prends une voix de crooner pour annoncer à qui veut bien l'entendre, que les élèves qui vont suivre vont encore vivre une année de rêve avec un prof comme moi. Que les autres n'ont pas de chance mais que ce n'est pas grave, la prochaine fois peut-être. La vie n'est pas juste, c'est ainsi. Et je commence l'appel. Sous le regard stupéfait de mes deux stagiaires, j'agace mes collègues et je suis content.
Je vous offre le petit texte de rentrée pour ma classe principale et leur première incitation.